Pourquoi le silence de certaines femmes sur les actes de violences conjugales commises par les hommes?



Dans le cercle familial et dans ma communauté, les femmes continuent à être battues, maltraitées et tuées par leur conjoint. Beaucoup des victimes gardent le silence total. Des blessures sur le corps des femmes, leurs cris de détresse entendus par le voisinage, leurs renvois du toit conjugal …, sont autant des signes qui témoignent sur les sévisses endurées par les survivantes.



Plusieurs cas de violences sexuelles et celles basées sur le genre commis dans la communauté sont retransmises dans les médias locaux et en particulier par une radio de développement dans ses émissions intitulées «Habari ya Vigigini» (Nouvelles des villages) .Ladite émission est très suivie par le public surtout en ce qui concerne les informations sur les violences sexuelles. La description par les reporters des crimes conjugaux ainsi que les motivations à la base, amusent plus d’un auditeur et auditrice. D’autres personnes les considèrent tout simplement comme des faits banals.



Au cours de ce mois, une femme de plus de 55 ans, mère de 9 enfants, a coupé la langue de son mari lorsqu’ils se disputaient la nuit dans leur chambre. L’homme est mort quelques heures de suite de l’hémorragie. Le défunt était le frère d’une de mes amies. La meurtrière avait pris fuite, probablement cachée et aidée par les membres de sa famille. Cette information m’a été données dans le plus grand secret par le mari de mon amie, sœur du défunt, avant que je me rende au deuil.



Le domicile où le drame, est situé dans un des quartiers populaires de la ville de Bukavu. Il y avait plein de monde. Il m’était difficile de s’approcher près de la maison endeuillée. C’est donc dans la foule que j’avais pu passer deux heures sur place en train d’observer les va et viens des policiers, des personnes.



D’après les brides de conversation saisies, j’avais vite noté que tout le monde évitait de commenter ce qui s’était passé. Les hommes étaient très choqués par l’acte de la femme sans se poser des questions sur les mobiles dudit acte; tandis que les femmes ne faisaient que regretter que ce qu’elles qualifiaient «des choses qu’on ne peut pas parler au grand jour». C’est dans la même optique que la présence des policiers chargés de l’enquête était mal vue.



En voyant les attitudes affichées par l’assistance, j’avais compris que cela s’expliquait par la socialisation reçue en famille dès l’enfance, socialisation qui prône la supériorité du garçon, de l’homme sur la fille, et sur la femme. C’est ce qui fait aussi que les actes de violences conjugales et sexuelles soient faiblement condamnés dans la communauté. Un activiste du milieu qui se trouvait àmes cotés, avait déploré qu’au dehors, la même socialisation est entretenue par la prolifération des Eglises de Réveil (dont 80% de leurs fidèles sont des femmes) par leurs prédications et par certains symboles tels que la dot de la fille.



Autrefois,la dot était considérée comme un symbole de compensation (remerciement à la famille de la fille) et de substitution (versement dot pour permettre au frère de la jeune fille à chercher une femme).Actuellement la dot devient dans ma communauté un véritable fonds de commerce, un enrichissement d’une famille .Et une fois qu’elle est versée à la famille de la fille, la future femme se retrouve à la merci de son mari et de sa belle famille.





Devant le silence des femmes et des hommes sur les violences sexuelles et en particulier sur celles conjugales, je continue à penser que la communauté doit être toujours informée sur leurs conséquences néfastes sur les femmes . C’est pour concrétiser cela que mon organisation Grenier pour le développement du Bushi «GDIBU» a toujours mené des actions de sensibilisation de proximité sur la thématique afin d’amener les femmes en particulier à remettre en cause tout ce qui entretient les violences à leur égard. Pour la paix de la femme et la réduction des violences conjugales, GDIBU compte avec un financement externe, mener des actions diverses de plaidoyer au niveau local auprès des détenteurs de la coutume et de la loi.





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