LA LIBERTE D'EXPRESSION EN RDC



LA LIBERTE D’EXPRESSION EN RDC



Pour encourager les journalistes congolais à bien faire leur travail, les professionnels des médias avaient imaginé le coupage. Cette pratique consiste pour les médias à recevoir de la source d’information des présents en espèces ou en nature. Aujourd’hui, ce système conduit à de nombreuses dérives.



Un petit groupe de jeunes gens du territoire de Rutshuru, au Nord-Kivu, décide de sortir pour débattre avec leurs pairs de la communauté voisine. En route, ils tombent dans une embuscade d’un groupe armé. Un des jeunes réussit à s’échapper et à alerter un ami qui habite à Goma, la capitale de la province.



Cet ami, animé par les meilleures intentions, contacte certains notables de la ville et prévoit de parler de cet incident à la presse. Là, une surprise l’attend. \"Une maison de presse m’a demandé 100 dollars américains pour diffuser notre cri d’alarme,\" se souvient-il. \"Je me demande si nous, qui vivons avec moins d’un dollar par jour, n’avons pas le droit de nous exprimer.\" Ses amis seront finalement relâchés 3 mois plus tard, grâce à l’intervention de certains politiciens influents de la région. Mais dans les médias, pas une trace de ce kidnapping.



Les initiateurs d’associations locales sans but lucratif se plaignent aussi. Arsène Tungali, fondateur de l’association Rudi International, a organisé une conférence sur la bonne gouvernance. Quand il contacte une maison de presse de la place pour avoir une couverture médiatique de son événement, la réponse est catégorique. \"Ils m’ont dit que si je n’ai pas 150 dollars, ils ne seront pas là,\" regrette Arsène. Le budget de toute la conférence atteignait à peine les 100 dollars.



Le coupage viole la déontologie journalistique
Communément appelé \"coupage\", cette pratique viole l’article 7 du code de déontologie des journalistes en RD Congo, publié par l’Observatoire des medias Congolais. Article qui stipule qu’\"un journaliste ne doit jamais accepter un cadeau de la part des sources d’informations pour diffuser, étouffer, distordre ou supprimer une information.\"



Conséquence de ces pratiques : des jeunes auditeurs se disent ennuyés par la nature des informations diffusées dans ces médias. \"Je suis choqué de suivre un journal d’actualités qui ne parle que des voyages des autorités, les visites qu’ils ont reçues\", déclare Ibrahim Ali Shako, jeune habitant de Goma. \"Alors que nous avons des problèmes sociaux beaucoup plus importants.\" Cet avis est partagé par Arsène Tungali qui dénonce un laisser-aller de la part du gouvernement.



Des plans de contingence
Devant ces différentes plaintes, responsables des médias et gouvernement ont des plans de contingence. Bien qu’étant une chaîne commerciale, le groupe de presse Mishapi se dit prêt à réorienter les interventions des jeunes. Blaise Pascal, chef de programme, affirme : \"Si ces jeunes n’ont pas d’argent pour passer dans le journal, nous pouvons les faire intervenir dans d’autres émissions thématiques. Il suffit de nous le faire savoir dans les temps.\"



Coté gouvernement, un plan d’assainissement est prévu pour fermer toutes ces maisons de presse qui ne remplissent pas correctement leur mission. \"Nous attendons la fin de la guerre pour passer à l’acte,\" assure Eric Kitsa, chef de division de l’information et de la Communication au Nord Kivu. \"Le problème que nous pourrons rencontrer est au niveau des médias non autorisés, mais protégés par des politiques.\"



Pendant ce temps, faire passer un message par les médias reste un luxe que beaucoup des Gomatraciens ne peuvent pas s’offrir. La prise de conscience des responsables des médias et une intervention concrète de l’Etat aideraient à inverser la courbe. En subventionnant des médias sans moyens et en sanctionnant ceux qui dérapent, l’Etat congolais contribuerait a promouvoir la liberté d’expression.

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